Carmen Jolin

Comédienne, chanteuse-interprète et metteure en scène

Directrice artistique et générale du Groupe de la Veillée et du Théâtre Prospero de 2010 à 2021

Née et grandie à Trois-Rivières, Carmen Jolin a poursuivi des études de lettres qui lui feront découvrir son amour des textes. Parallèlement à celles-ci, elle chante dans des boîtes à chansons du Québec, joue dans des spectacles de théâtre, avec la troupe du Point-Virgule (une dizaine de productions), entre autres. Avec ses vingt ans pour tout bagage, elle entreprend en 1972 un périple de six mois en Europe. Elle visite les villes de théâtre : Londres, Paris, Wroclaw, Varsovie, Cracovie, Barcelone, Prague, et s’attarde en Pologne, au Festival International de Théâtre étudiant à Wroclaw. Voyage initiatique s’il en est, pendant lequel elle assiste au Songe d’une nuit d’été de Peter Brook à Londres, à Apocalypsis Cum Figuris, du Théâtre Laboratoire de Grotowski à Wroclaw, deux spectacles qui seront déterminants pour la suite des choses.

À son retour, elle s’installe à Montréal, travaille en tant qu’actrice et musicienne avec la compagnie de théâtre l’Organisation Ô, dirigée à l’époque par Guy Corneau, écrit des chansons et donne des concerts dans les cafés montréalais, participe à quelques émissions de télévision et de radio en tant qu’auteure-compositeure-interprète. Elle poursuit une formation en solfège, chant et harmonie à l’Université du Québec à Montréal et auprès de professeurs privés.

Chanteuse et comédienne

En 1982, elle rejoint l’équipe du Groupe de la Veillée, avec qui elle se reconnaît des affinités artistiques. Parade Sauvage, spectacle de poésies chantées, est créé en 1984 suite à un travail de deux ans. Si elle chante des poèmes de Rimbaud et Baudelaire, elle choisit également des textes de Sylvia Plath, Marina Tsvetaieva, Anna Akhmatova ou Rainer Maria Rilke sans omettre quelques poètes québécois, Sylvain Garneau et Gérald Godin. Sous la direction artistique de Téo Spychalski, Parade sauvage sera repris plusieurs fois au cours des dix dernières années, dans des versions musicales et théâtrales différentes.

Carmen Jolin joue dans plusieurs autres spectacles du Groupe de la Veillée. Sous la direction de Téo Spychalski, on la voit dans Un bal nommé Balzac (1987), Penthésilée de H. Von Kleist, dont elle signe l’adaptation (1990), Créanciers de August Strindberg (1993), Les Démons d’après Dostoïevski (1996), L’heure du Lynx de Per Olov Enquist (2008), et dans Le Roi se meurt, de Ionesco (1994), une mise en scène de Gregory Hlady. Au cours de cette période, elle participe à plusieurs tournées internationales de la compagnie en France, Belgique, Suisse, Pologne, Allemagne.

Adaptations et mises en scène

En 1999, elle adapte et met en scène Mademoiselle Else, d’après une nouvelle d’Arthur Schnitzler. Cette première mise en scène est saluée par les critiques, tout comme celles qui suivront : Les Bonnes de Jean Genet (2000), Trois femmes grandes de Edward Albee (2004).

En 2005, elle réalise un important travail d’adaptation d’un roman complexe de Witold Gombrowicz et met en scène Ferdydurke, dans le cadre de l’Automne Gombrowicz organisé par Le Groupe de la Veillée. La saison suivante, le spectacle est repris dans sa version finale, augmentée d’une troisième partie. En 2007, elle met en scène Antilopes de Henning Mankell. La pièce connaît un grand succès, public et critique. Elle sera reprise la saison suivante.

Directrice adjointe du Groupe de la Veillée et du Théâtre Prospero

Membre du Groupe de la Veillée depuis 1982, Carmen Jolin participe fortement au développement de la compagnie. Elle a été directrice adjointe à compter de 2000, et dirigé également le secteur des communications et celui de la campagne de financement de l’organisme. Depuis la reconstruction complète du théâtre en 1995, projet dans lequel elle s’est intimement impliquée, elle se consacre au développement du Théâtre Prospero, lieu de diffusion où sont données autour de 200 représentations par saison. Elle participe aux choix des textes produits par Le Groupe de la Veillée, elle collabore à l’élaboration de la programmation artistique des spectacles en accueil présentés au Théâtre Prospero, elle assiste certains des metteurs en scène invités dans leur processus créatif, en les accompagnant dans leur travail. Elle travaille actuellement à l’élaboration des prochaines programmations et à des projets artistiques personnels.

En janvier 2010, Téo Spychalski quitte ses fonctions de directeur après un passage marquant à la compagnie et de nombreuses autres créations (dont La faim, Blackbird, Moi, Feuerbach, Le professionnel). Carmen Jolin, au développement des activités depuis plusieurs années, lui succède. Elle poursuit l’aventure par l’instauration de nouveaux partenariats avec des artistes avant-gardistes de la communauté théâtrale, par la création de nouvelles initiatives (Territoires de paroles), par le resserrement de liens avec de jeunes compagnies et des créateur.trice.s qui portent des projets audacieux. On compte parmi ceux et celles-ci, Christian Lapointe (Oxygène de Viripaev), Catherine Vidal (Des couteaux dans les poules, Avant la retraite, Je disparais), Florent Siaud (Illusions et Les enivrés de Viripaev), Angela Konrad (Platonov, amour, haine et angles morts), Roland Auzet (Écoutez nos défaites END, The One Dollar Story), Joël Beddows (Solstice d’hiver), sans oublier le retour de Gregory Hlady (La noce, La danse de mort, Le joueur).

Son mandat marque également le retour de La Veillée à la tournée internationale (Écoutez nos défaites END en 2018, Nous l’Europe, banquet des peuples en 2019) et la diffusion de nombreuses coproductions impliquant des artistes du Québec et d’ailleurs (Ontario, France, Suisse, Haïti).

Fin 2020, elle annonce la fin de son cycle de direction. La saison 2021-2022 constitue sa dernière programmation.

En un peu plus de quatre décennies, avec près de soixante-dix créations et l’accueil de plus de 335 autres productions, La Veillée et le lieu effervescent qu’elle anime, le Prospero, sont devenus des points d’ancrage et de rayonnement de la création et de l’exploration théâtrale sous des formes multiples pour le développement de points de vue distinctifs.

Carmen Jolin © Gaëlle Leroyer